06/05/2015

Jésus dans les rues - Nicky Cruz

Mes parents étaient spirites. Ils mettaient des annonces dans les journaux de langue espagnole en indiquant qu'ils parlaient avec les morts, guérissaient les maladies, aidaient à résoudre les problèmes. Il n'y avait qu'une pièce à la maison alors nous, les enfants, nous devions tous sortir. Je passais donc la plupart du temps dans les rues de New York.

Au début, les enfants du quartier me battaient et j'avais peur, tout le temps. Puis j'appris à me battre et ensuite, ce sont eux qui avaient peur de moi et me laissaient tranquille. Au bout d'un certain temps, je préférais la rue à la maison. A la maison, j'étais le plus jeune et je n'étais rien. Mais dans la rue on savait qui j'étais.

Une bande de gangsters

Un jour, je me joignis à une bande de gangsters, les "Maus-Maus". Ils firent donc de moi leur vice-président et le sergent chargé de l'arsenal. Nous avions des ceintures de l'armée avec des baïonnettes, des armes blanches et des revolvers. J'appris à manier le couteau de manière à blesser quelqu'un sans le tuer. J'ai ainsi blessé seize personnes et je suis allé douze fois en prison.

Un jour, nous étions en train de boire une limonade dans un grand magasin lorsque sept membres du gang des "Bishops" entrèrent et nous provoquèrent. Il y avait un couteau de boucher sur le comptoir. Un de mes potes le prit et frappa cinq fois à la tête un des jeunes du gang rival. Je savais qu'il était mort. La femme du patron voulut téléphoner à la police, mais un autre de mes potes ramassa le couteau de boucher et la frappa mortellement à l'estomac. Puis nous prîmes la fuite.

Seul dans la ville

Je n'avais pas touché le couteau et ne fus donc pas mis en prison. Mais mes parents furent convoqués au tribunal. J'avais l'impression que c'était la première fois qu'ils faisaient réellement attention à moi. Ils prirent peur et décidèrent de quitter New York pour retourner dans leurs pays natal, à Puerto Rico. Au retour de l'aéroport, où nous étions allé leur dire au revoir, mon frère me donna un pistolet et me dit: "A présent, tu es ton propore maître, Nick!". Avec mon pistolet, je menaçai un type à qui je soutirai 10 dollars pour louer une chambre où dormir. J'avais 16 ans.


Durant le jour tout allait très bien: j'étais avec le gang. Mais la nuit, c'était terrible. Seul dans ma chambre, 'aurais voulu cogner ma tête contre le plancher pour cesser de penser aux deux personnes qui avaient été tuées dans le magasin. Je m'éveillais en sursaut au milieu de la nuit et j'appelais ma mère.

Une rencontre inattendue

En juillet 1958, j'allais avoir 18 ans. A peine sortis du métro, alors que nous menions une expédition punitive contre le gang des "Dragons" pour venger un des nôtres, nous aperçûmes un attroupement à proximité d'une voiture de police. Il y avait là des membres d'un gang ami, les "Chaplains", rassemblés autour de deux types que je n'avais jamais vus. L'un deux avait un clairon. Alors quelqu'un apporta le drapeau américain et la voiture de police s'éloigna. Tout cela voulait dire que les deux types allaient tenir une réunion de plein air.

L'un d'eux monta sur une chaise, ouvrit un livre et lut:
- «D.ieu a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en LUI ne périsse point mais qu'il ait la vie éternelle.»
Puis il se mit à prêcher au sujet de l'amour de Jésus pour "quiconque".

J'ordonnai aux gars de mon gang de nous en aller mais, pour la première fois, ils me désobéirent. Puis, tout à coup, le prédicateur se tourna vers moi et me dit:
- «Nicky, je t'aime.»
Jamais personne ne m'avait dit ça. Ne sachant que faire, je répondis: - « T'approche pas de moi, prêcheur, ou je te tue!»
Seulement, en oubliâmes d'aller nous battre contre le gang des Dragons.

Le challenge

Plus tard, le prédicateur revint nous inviter à une grande réunion organisée pour les gangs au centre de New York, à Manhattan. Je n'avais pas l'intention d'y aller, mais le prédicateur envoya un bus pour nous prendre. Arrivés à la salle, nous fûmes surpris d'y voir trois rangées de chaises qui nous étaient réservées.
Lorsque le prédicateur annonça la collecte pour payer la location de la salle, il dit:
- « Nous allons demander à des membres des gangs de la faire. Puis-je avoir six volontaires? »
En une seconde, j'étais debout. Je désignai cinq de mes gars. Je pensais m'enfuir par une porte dérobée avec le fruit de la collecte et, de cette manière, ridiculiser le prédicateur. Mais le prédicateur me faisait confiance et cela ne m'était jamais arrivé. Alors mes gars furent surpris de me voir monter sur l'estrade pour lui remettre l'offrande. Jamais un auditoire n'avait connu un tel silence aussi rapidement!

Puis le prédicateur se mit à parler du Saint-Esprit, disant qu'il pouvait entrer dans les gens et les rendre purs. Il ajouta que, quoi que nous ayons fait, le Saint-Esprit pouvait nous faire naître de nouveau. Soudain je me pris à désirer cela intensément. C'était comme si je me voyais pour la première fois. Toute la noirceur de mon âme, la haine, la folie, passaient comme un film devant mes yeux.

Une vie nouvelle

- « Vous pouvez devenir quelqu'un d'autre, dit-il. Votre vie peut être changée. »
Je le désirais, j'en avais besoin, mais je ne croyais pas que cela puisse m'arriver. Le prédicateur nous invita à nous avancer vers le podium si nous voulions être changés mais je croyais qu'il n'y avait rien à faire pour moi. Alors Israël, notre chef de gang, nous dit de nous lever tous.
- «Je suis le Président, dit-il, et tout ce gang va se lever !» .

J'étais le premier de la rangée ! Je m'agenouillai et je prononçai la première prière de ma vie:
- «Cher Seigneur, je suis le plus grand pécheur de New York. Je ne crois pas que tu me veuilles à toi. Mais si tu me veux, je me donne à toi. Je veux devenir aussi bon pour Jésus que j'ai été mauvais dans le passé.»


Rentré chez moi, je me demandais si le Saint-Esprit était réellement en moi, et comment je le saurais. Et ce qui se passa en premier quand je fus dans ma chambre, c'est que je n'avais plus cette peur. J'ai ressenti comme une compagnie agréable, comme si ma mère était revenue.


Livre de Nicky Cruz :

Du ghetto à la vie ", Ed. Vida, 2015

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