04/10/2013

Mon frère le soleil - Francesco Bernardone

Francesco Bernardone, un mystique du 12ième siècle de l'ère chrétienne, est un modèle remarquable de fils prodigue. A l'instar de Siddhartha Gautama, le Bouddha, il est passé d'un état de captivité à l'intérieur de la tour des valeurs aristocratiques et bourgeoises de son temps au statut d'homme libre, capable de vivre au ras des pâquerettes en harmonie avec ses pairs et le monde créé compris dans sa dimension cosmique et universelle.


Quelques images du film "Brother Sun, Sister Moon", réalisé en 1972 par Franco Zeffirelli, serviront, ci-dessous, à schématiser brièvement quelques étapes majeures du cheminement de celui que je considère comme un guide pour notre temps. Pour qui désire s'intéresser de plus près à cette figure marquante de l'histoire du peuple de D.ieu en Occident, il existe un ouvrage de Julien Green dont je recommande vivement la lecture, qui s'intitule "Frère François".


Le film de Zeffirelli nous plonge, dès les premières minutes, au cœur d'un débat, d'une agonie, d'un tourment dont les mouvements d'abord fiévreux, incertains, hésitants, aboutissent finalement à la mort de son personnage principal et à sa nouvelle naissance.


Fils d'un riche marchand gorgé d'ambition, Francesco était promis à un avenir possible au sein de la classe des nobles de son époque. Se faire remarquer à la guerre et envisager de contracter mariage avec une gente damoiselle portant titre faisaient partie des moyens mis en œuvre pour atteindre cet objectif.


Fait prisonnier et relâché ensuite en mauvaise santé, Francesco revint bredouille de la bataille opposant la commune d'Assisi à la ville voisine de Perugia. Le temps passé en prison favorisa sans doute la remise en question de l'idéal de vie et des valeurs véhiculées par son père.


Le train de vie insouciant que le jeune homme avait mené jusque là avait pour point d'appui la fortune que son père s'était acquise par le commerce d'étoffes précieuses. La vie de Francesco telle qu'elle est relatée dans le film présente à ce stade quelques analogies avec la vie de Siddhartha Gautama:


Zeffirelli fait descendre son personnage dans les soubassements de sa demeure, où une rencontre brutale avec la vieillesse, la maladie et la mort lui ouvrent le champ de conscience. Le commerce du tissu, aussi lucratif et florissant fut-il, se fait aux dépens d'une couche de population dont le travail s'apparente à de l'esclavage.


« Heureux les affamés de justice, ils seront rassasiés » clame l'évangile de cette église dont fait partie la famille Bernardone, cette institution religieuse engoncée dans ses richesses, qui fait la part belle aux puissants de ce monde et relègue à l'arrière-plan les pauvres gens qui sont au cœur des préoccupations de Jésus de Nazareth. Dans un mouvement qui engage tout son être, Francesco donne sa réponse à cet évangile annoncé par Jésus, qui proclame par ailleurs "Heureux les pauvres, le royaume des Cieux est à eux", et fait le choix de la pauvreté volontaire.


Tout à la joie du secret de la sagesse qu'il vient de percer, il se dépouille de ses biens et il invite les siens à en faire autant. C'est le prix à payer pour être affranchi de l'esclavage de l'argent. C'est le tribut qu'il lui semble devoir verser pour obtenir la liberté intérieure et la paix du cœur.


Désormais dégagé des richesses créées de toutes pièces par la main de l'homme, Francesco est à même de tourner enfin librement ses regards vers le cosmos dont il fait partie en tant que créature au même titre que n’importe qui, et qu’il considère désormais dans toute sa splendeur comme une invitation à l’émerveillement, au respect de l’autre dans sa singularité et à la louange du Créateur.